Etre allée à Damas une fois l'aidait, certes, mais elle n'en restait pas moins sceptique quand au chemin précis à prendre. Encore amusée du tour qu'elle avait joué aux deux gardes, se retenant d'éclater de rire toute seule -ce qui aurait paru très étrange ou malsain, selon les personnes- en songeant à leurs têtes atterrées, elle s'élança dans un petit trot vers la forêt qu'elle devrait traverser pour parvenir à Damas.
Et puis ses pensées divergèrent finalement vers Fiora Cavazza. Ezio n'avait pas été trompé, alors pourquoi avait-il autorisé cet Assassin à risquer sa vie? Même si celui-ci l'avait accepté, Mélanie ne pouvait concevoir que son cousin l'ait laissé faire. Pourtant, avec le recul, ce sacrifice était bien nécessaire. Ce qui était sûr, c'était qu'elle ne pourrait jamais pardonner à Fiora d'avoir ainsi trahi. La vérité s'imposa à elle, elle la haïssait pour ce qu'elle avait fait. Avoir osé rompre le serment qu'elle avait fait au Maestro, même si celui-ci avait perçu la tromperie, était quelque chose d’impardonnable. Cette courtisane n'était qu'une traîtresse, tant aux Templiers qu'aux Assassins. L'Auditore avait senti quelque chose d'instable en Fiora. Comme si elle n'avait pas réellement de camp. Savait-elle finalement ou elle allait, ou même ce qu'elle voulait? Avait-elle des proches en danger menacés pour qu'elle se retourne ainsi à plusieurs reprises contre chaque camp auquel elle jurait allégeance? Ou bien ignorait-elle simplement quoi faire de sa vie?
La jeune Assassine interrompit ses pensées quand elle pénétra dans la forêt. Le plus simple était passé, il s'agissait à présent de se jouer de son incapacité de repérage pour se souvenir du chemin exacte menant à Damas. Elle ralentit un peu l'allure, histoire de prendre son temps et éviter de partir dans la mauvaise direction. La fois dernière, traverser le passage de la forêt ne lui avait pris qu'une journée. Etant partie très tôt, avec un peu de chance, elle en serait sortie le soir-même. Après la forêt se trouvait quelque dizaines de kilomètres de paysages plutôt neutres ponctués à plusieurs reprises de longues parties de végétation. Comme de petites forêts, disposées ça et là, mais relativement moins pénibles à traverser que la première qui s’étendait sur près d'une centaine de kilomètres. Les routes étaient de plus en plus rares à l'approche des terres arides et sèches qui entouraient Damas et ses environs.
Au bout de quatre jours de voyage, Alula lancée le plus souvent au galop pour gagner du temps, la silhouette imposante des grandes murailles de Damas se profila enfin à l'horizon. Heureuse d'être enfin arrivée, Mélanie freina un peu sa jument, lui flattant l'encolure comme pour la remercier d'avoir été aussi courageuse et d'avoir chevauché à ses ordres sans rien dire. En y repensant, il y avait comme un lien qui était en train de se créer entre les deux êtres. Depuis la fois ou elle l'avait montée pour la première fois, lorsque Léonardo avait pu l'obtenir auprès d'une de ses connaissances, elle n'avait jamais monté d'autres chevaux.
-Tu sais quoi? J'ai l'impression qu'on en a encore pour un bout de temps toi et moi...
Comme pour acquiescer, Alula poussa un petit hennissement et se remit à trotter tranquillement sans indications, ce qui eut pour effet de déclencher un petit rire chez l'Assassine. Les portes étaient en vue.